Les catéchèses de Jean Paul II sur la Genèse (novembre 1979) et sur le Cantique des Cantiques (juin 1984), parmi les plus belles de son pontificat, méritent d’être connues et méditées.
 

Sur la Genèse


« Cette fois, celle-ci est l’os de mes os, la chair de ma chair. Celle-ci, on l’appellera Femme parce que d’un homme elle a été prise » (Gn 2,23). À la lumière de ce texte, nous comprenons que la connaissance de l’homme passe par les caractères masculin et féminin qui sont comme deux « incarnations » de la même solitude métaphysique devant Dieu et le monde — comme deux manières d’« être corps » et d’être en même temps être humain qui se complètent réciproquement —, comme deux dimensions complémentaires de l’« autoconscience » et de l’« autodétermination » et en même temps comme deux consciences complémentaires de la signification du corps. Ainsi (...), le féminin, d’une certaine façon, se retrouve lui-même face au masculin, tandis que le masculin se confirme par le féminin. (...)
L’homme et la femme s’unissant l’un à l’autre (dans l’acte conjugal) de manière si étroite qu’ils forment « une seule chair » redécouvrent, pour ainsi dire, chaque fois et de manière toute particulière, le mystère de la création et retournent ainsi à cette union dans l’humanité (« chair de ma chair et os de mes os ») qui leur permet de se reconnaître réciproquement et, comme la première fois, de s’appeler par leur nom. En un certain sens, cela signifie revivre l’originelle valeur virginale de l’homme qui émerge du mystère de sa solitude face à Dieu et au milieu du monde. Le fait qu’ils deviennent « une seule chair » est un lien puissant établi par le Créateur à travers lequel ils découvrent leur propre humanité, soit dans son unité originelle, soit dans la dualité d’une mystérieuse attraction réciproque. Mais le sexe est quelque chose de plus que la force mystérieuse de la corporéité humaine qui agit presque en vertu de l’instinct. À niveau d’homme et dans la relation réciproque des personnes, le sexe exprime un dépassement toujours nouveau des limites de la solitude de l’homme inhérente à la constitution de son corps et en détermine la signification originelle. Ce dépassement contient toujours en soi une certaine prise en charge comme sienne propre de la solitude du corps du second « ego ».
 

Sur le Cantique des Cantiques


La vérité de l’amour s’exprime dans la conscience de l’appartenance réciproque, fruit de l’aspiration et de la recherche mutuelles (...). Dans cette nécessité intérieure, dans cette dynamique d’amour, se révèle indirectement la quasi-impossibilité pour une personne de s’emparer, de prendre possession de l’autre personne. La personne est un être qui dépasse absolument toutes les mesures d’appropriation et de propriété, de possession et de satisfaction qui émergent du langage du corps lui-même. Si l’époux et l’épouse méditent ce langage dans la pleine vérité de la personne et de l’amour, ils parviennent à une conviction toujours plus profonde que l’ampleur de leur appartenance mutuelle constitue ce don réciproque, dans lequel l’amour se révèle « fort comme la mort », c’est-à-dire qu’il remonte jusqu’aux dernières limites du langage du corps pour les franchir. En un certain sens, la vérité de l’amour intérieur et la vérité du don réciproque appellent continuellement l’époux et l’épouse à travers les moyens d’expression de l’appartenance réciproque et même en se détachant de ces moyens, à atteindre et parvenir à ce qui constitue le noyau même du don de personne à personne.