Labor et Fides, coll. « Nouvelle piste », 2005, 112 p., 18 euros.

Ce petit ouvrage se présente comme un parcours pédagogique lumineux, audacieux et original.
Audacieux quand on y lit sous la plume d’un protestant que si la Réforme ne s’était pas laissé absorber dans la défense presque exclusive d’une théologie de la parole, peut-être n’aurait-elle pas perdu cette dimension que l’Église ancienne connaissait si bien de la beauté comme signe de la présence de Dieu, au quotidien. Et l’auteur d’ajouter qu’elle aurait pu et dû développer les potentialités esthétiques de la pensée de Calvin : l’art comme don de la grâce de Dieu, le déchiffrement du quotidien comme trace du travail de Dieu au coeur de l’homme. La peinture flamande, dit-il, plongée dans les réalités les plus banales, en témoigne admirablement.
Quant à l’originalité, elle se déploie dans l’ouverture de cette réflexion à l’art moderne et contemporain. Après avoir résumé rapidement les grands débats théologiques et leurs tensions depuis Nicée II, Fuchs en déduit des clés de compréhension théologiques pour cet art émancipé des traditions chrétiennes. Ici, Fuchs propose de magnifiques exemples d’une peinture qui cherche dans et au-delà de ce que la réalité peut présenter : Soleil Levant de Monet, la Chambre de Van Gogh, une forme à peine humaine de Bacon… Il invite le lecteur à perdre pied dans les tourbillons de Bram Van Velde ou de Pollock, car pour lui, l’art est une quête du sens, un dévoilement progressif de la vérité, une recherche de l’être, une parole qui est adressée. À partir du moment où il est authentique, il y a dans l’art quelque chose de « religieux », qui relie le temps et l’espace et fait de lui « l’attestation de la vocation spirituelle de l’homme », sans être nécessairement au service d’une doctrine.
La théologie de l’art est une ouverture à la conscience de ce qu’est notre monde.