Avec ces carnets, Christiane Rancé offre une série de méditations lumineuses qui donnent à l'ouvrage l'allure d'un vitrail. Il recouvre presque deux années de la vie de l'auteure mais, plus que les événements qui la marquent, l'important est ici la lumière de l'amour, qui donne sa couleur et son éclat particulier à chaque moment de l'existence, à commencer par les plus douloureux. « Peut-être toute ma joie se joue-t-elle dans la région du malheur », écrit-elle en relatant dans les premières pages la maladie et la mort de sa sœur, sa confidente et amie. Et, à l'autre bout du livre, ou presque, elle nous dit qu'après la mort de sa dernière fille, c'est le refus d'abandonner son amour maternel au désespoir et au procès contre Dieu qui la sauve d'une colère longue et tenace, et lui donne d'aimer sa fille jusque dans sa disparition. « La victoire sur soi-même que suppose la joie est un surcroît de vie. » D'un bout à l'autre, des méditations aussi savoureuses que diverses, font de ces « carnets spirituels » un hymne à la joie, qui est « la présence de Dieu ». On goûtera particulièrement les passages sur « la douceur qui apprivoise », la manière « artiste » de lutter contre la morosité, le dialogue qui « recrée l'espérance », la musique et ses « deux ailes : la grâce et la liberté », mais surtout peut-être « la double liberté que révèle le christianisme » et qui traverse l'écriture lumineuse de Christiane Rancé : « celle du Créateur, celle de la créature ». Un livre dense mais aisé à lire.