Élisabeth Behr-Sigel a été une haute figure de l'orthodoxie de France et, plus simplement, comme le montre ce recueil, du christianisme français. Née luthérienne, devenue orthodoxe au début des années 1920, fille spirituelle de Dom Gillet, ancien moine bénédictin venu lui aussi à l'orthodoxie, elle a toujours eu pour fil directeur de sa vie la quête de l'unité des chrétiens, créant un cercle œcuménique pendant la guerre, participant au Conseil œcuménique des Églises (COE) ou à l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (Acat). La lecture de ces textes, savamment réunis par Olga Lossky (qui lui a consacré une biographie, il y a quelques années), convainc de la cohérence de sa démarche. Elle traverse les différentes questions vives de l'unité : non pas directement les nœuds de discorde, mais le rapport à la Bible, aux Pères de l'Église, à la Tradition, les enjeux anthropologiques mais aussi ce que signifie vivre en chrétien dans la perspective de l'unité. Ces questions sont d'autant plus vives que le style est direct, simple, expression du souci de s'adresser à ses lecteurs hic et nunc. Bien souvent, on croirait ne plus être en train de lire un texte, mais d'écouter cette femme nous adresser, dans tous les sens du terme, la parole. Élisabeth Behr-Sigel fait vibrer dans ses écrits une tonalité qui lui est propre, celui d'une femme libre, par ses choix et ses engagements, libre d'une liberté pudique, simple, désarmante, au service de l'espérance dont elle aimait à dire que les femmes en étaient les gardiennes.