Matière sensible, l'accompagnement pastoral des personnes divorcées et remariées est peu à peu sorti de la confidentialité depuis le Concile, avec un changement progressif d'état d'esprit. Les papes Jean Paul II et Benoît XVI avaient reposé la question de leur accueil et renouvelé le vocabulaire. À la faveur de l'exhortation apostolique du pape François La joie de l'amour (Amoris lætitia, 2016), de nouveaux chemins s'ouvrent pour les innombrables baptisé e s en « situation conjugale complexe », ce qui recouvre bien des réalités : couples de fait, pacsés, divorcés remariés, homosexuels, etc. Alors que se vit une année « Famille Amoris lætitia » pour approfondir l'exhortation et découvrir les nouvelles initiatives, le jésuite Patrick Langue, lui-même accompagnateur de nombreux couples, invite résolument les diocèses et les pasteurs à emprunter ces nouvelles voies pour l'intégration des personnes divorcées remariées.

La première partie explicite les raisons de l'approche du pape François en les inscrivant dans le développement magistériel. Elle valorise la richesse de la « double tradition » du respect de la conscience et de la dimension spirituelle du discernement. La seconde partie s'emploie à faire goûter cette démarche spirituelle, avec un principe : « pas de modèle » rigide. L'accompagnement est toujours singulier, marqué par la « diversité infinie des figures de couples ». L'intégration est, elle aussi, toujours singulière. Si le retour à la vie sacramentelle peut tout à fait en faire partie, elle ne s'y résume pas. Au fond, cette voie spirituelle est avant tout une relecture de vie.

Le focus sur la posture intérieure de l'accompagnateur et des accompagnés s'accompagne de rappels bienvenus : « le jugement de l'accompagnateur est toujours inopportun », « l'insistance sur la sexualité des personnes divorcées ne saurait être au cœur de l'accompagnement ». Il est heureux que de nombreux éléments d'histoires conjugales soient partagés, car ils permettent de voir que celles-ci résistent aux jugements hâtifs et aux interprétations a priori. S'interroger, par exemple, sur qui a demandé le divorce peut s'avérer une impasse, la question de la responsabilité étant plus complexe.

L'accent porte peu sur la formation des communautés, or force est de constater que cela bloque ici ou là. Et pourtant, « les pasteurs ne peuvent empêcher volontairement, par idéologie ou par négligence, une meilleure intégration dans l'Église ou l'accès à la grâce sacramentelle ». Il est grand temps de progresser dans l'intégration effective des personnes, afin qu'elles ne demeurent pas au fond de l'église ou renoncent même à la fréquenter. C'est même une « urgence missionnaire absolue ». Ce livre riche, au style direct et simple, y encourage.