Disposant d’une semaine de cinq jours avec des étudiants qui terminent les années de formation d’ingénieur généraliste ou d’ingénieur par appren­tissage à l’ICAM, nous proposons une démarche qui permette d’expérimenter quelque chose des Exercices spirituels en partant du point où en sont les étu­diants, c’est-à-dire sans pouvoir nom­mer Dieu explicitement... C’est assez paradoxal quand on connaît Ignace qui a tellement expérimenté Dieu comme « son Créateur et Seigneur » et qui arri­vait à « trouver Dieu en toute chose » !
 

De quel lieu parle-t-on ?


C’est peut-être une caractéristique des jeunes ingénieurs qui terminent leur formation : il y a une vraie résis­tance à nommer Dieu comme le Fon­dement de leur vie, à en parler devant les autres. Bien sûr, ils adhèrent aux quatre valeurs prônées par l’établis­sement (confiance, liberté, solidarité, responsabilité) ; ils les mettent en pra­tique en prenant en charge l’anima­tion de la vie étudiante (Bureau des étudiants, sports, loisirs…), le travail à deux, quatre ou cinq sur des projets in­dustriels de création d’entreprises ou la « junior entreprise » ; la vie associative est florissante non seulement pour la vie culturelle, mais aussi pour aller vivre en Afrique ou en Inde des échanges humanitaires forts ; la solidarité proche avec les adultes qui viennent suivre une formation professionnelle permet un soutien scolaire entre un jeune futur in­génieur et un adulte qui redémarre une nouvelle vie professionnelle… Comme dans bien des écoles, il y a un esprit de promotion, surtout quand le nombre d’étudiants est limité à cent et que les deux premières années se passent dans une résidence universitaire permettant une vie commune très animée. Ils ont en outre de multiples occasions de relire le sens de ce qu’ils vivent avec un per­manent de l’école ou en petits groupes…
Et pourtant, les chrétiens qui confes­sent leur foi sont peu nombreux et viennent peu à la messe. Ceux qui y viennent « en veulent » et sont engagés dans le scoutisme, le MEJ ou les nou­velles communautés chrétiennes, mais ils se heurtent à des formes explicites d’anticléricalisme ou de scientisme. Il y a comme un décalage vertigineux entre le désir d’acquérir une vraie com­pétence professionnelle et l’expression d’une expérience religieuse. L’éducation chrétienne reçue dans la famille n’irait plus de pair avec une intelligence de la foi : il y a opposition entre la science et la foi ; l’héritage chrétien n’aurait plus de pertinence dans notre société post-moderne ; la personne de Jésus est intéressante voire séduisante, mais reste située au premier siècle de notre ère et ne peut apporter quoi que ce soit pour aujourd’hui... À cet âge de grande adolescence, les valeurs hautement af­firmées par l’institution et la famille semblent provoquer une sorte de rejet et un désir de positionner la foi dans le secteur le plus secret de son existence…
 

Du temps pour...


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