Au premier regard, nous pouvons nous demander si nous avons si souvent que cela l’occasion de prendre des décisions « en conscience ». Trois ou quatre fois dans une vie, m’a-t-on dit autour des années soixante (je n’avais pas encore vingt ans), au moment du mariage ou de l’engagement dans la vie religieuse, dans le choix d’un métier par exemple. Il est préférable de s’engager librement dans l’aventure du mariage, et la décision s’impose lorsque je sais que je veux faire de ma vie un don, et que c’est avec cette femme ou cet homme que je crois pouvoir donner ma vie. Il est d’autres façons de vivre que de donner sa vie, tels ceux-ci qui commencent une relation mais à la condition vite avouée que cela ne contrarie en aucune manière leur carrière professionnelle, leur amour de la montagne ou du rallye automobile, le plaisir de la bande de copains du samedi soir. Pas question de donner à sa vie l’orientation d’un don total, pour le moins prioritaire, à autre chose qu’à soi.
 

S’engager dans la vie religieuse

 
La vie religieuse aujourd’hui voit s’approcher des jeunes qui ne sont pas davantage décidés à donner leur vie. Une dose d’hu­manisme, de la générosité encombrante dont il faut bien faire quelque chose, mais demeure cette retenue : je ne peux m’engager pour toujours dans cette institution, avec ces frères-là, parce que je n’y trouverai pas mon compte. Au-delà de l’interrogation légitime (est-ce avec cette femme ou cet homme ? est-ce vraiment dans cet institut religieux ?), il y a, tout de même perceptible, le non-choix d’aimer vraiment, c’est-à-dire de donner « sa vie jusqu’au bout », précise l’évangile de Jean. Un choix à refaire très souvent. Je me souviens de cette