Nicolle Carré Psychanalyste, Paris. A publié chez L’Atelier : Préparer sa mort (2001) et Vivre avec une personne malade : des conseils pour la famille, les soignants, les accompagnateurs (avec H. Paris, 2007), et chez Albin Michel : Lune de miel amer (avec O. Carré, 2005). Dernier article paru dans Christus : « Du rêve à la réalité : se réconcilier, un apprentissage » (n°228, octobre 2010).  

Face au problème du chômage, on entend assez facilement dire : « Pour les courageux, il y a toujours du travail. S’ils le voulaient, ils pourraient travailler… » Quand la maladie est là, on se demande : « Ne s’est-il pas fabriqué son cancer ? » ; « Sa sclérose en plaques, n’est-elle pas le fruit de son stress ou de son alimentation ? » Ainsi firent les amis de Job, ainsi font nos amis. Que celui à qui il arrive malheur puisse y être pour quelque chose nous rassure en nous mettant du côté des justes. Nous pensons que ce que nous avons est lié à notre mérite, à notre travail. Nous sommes alors en droit d’interroger : que me veulent tous ces gens avec leurs misères ?
 

Les pauvretés des autres

Le pauvre s’affiche devant nos yeux comme un reproche vivant. Son malheur s’agrippe à nous. Les mendiants sur les artères des grandes cités volent au promeneur la tranquillité à laquelle il peut prétendre. Les familles qui ont un malade ou un handicapé semblent dire : « Ce que vous avez, j’y ai droit moi aussi. Ce n’est pas juste. » On ne peut donc que les haïr, mais on peut être si mal à l’aise de haïr qu’il vaut mieux fermer les yeux, ne rien voir, trouver des explications qui nous permettent de continuer notre chemin.
« Ce que tu as en trop, tu l’as volé » « Je voudrais voir l’abolition de la souffrance humaine afin de