Après Le Pas du temps à propos de l’évangile de Luc, Sur les sentiers de Qohéleth, et Souffles sur le livre des Actes des Apôtres, l’écriture poétique d’Agnès Gueuret poursuit son travail de relecture de l’Écriture. Le sous-titre de ce petit recueil, Généalogies, vient nous rappeler, si besoin était, que la Bible est pleine d’histoires d’hommes et de femmes qui lui donnent chair. Les disciples d’Emmaüs aux coeurs endeuillés, les femmes au tombeau au matin de la Résurrection, Job ébranlé jusqu’« à l’intime des os», Caïn qui rumine en luimême et frappe son frère (« D’un coup, la mort sur le vivant !»), Tamar qui trompe Juda pour recouvrer son droit, Ruth qui décide de suivre Noémi, David qui pleure la mort d’Absalom, Juda qui se repent, Nathanaël, Nicodème…, chacune de leur histoire, racontée, parfois en je, ou simplement évoquée, dit la profondeur de l’être humain.
 
Le lecteur entend dans ces textes variés, qu’ils reprennent seulement quelques versets (Sa mère, ses frères) ou prennent la forme d’un long poème narratif (Tamar), les injonctions prophétiques et bibliques à préférer le droit à l’injustice, à choisir la vie plutôt que la mort : « Écoute, de ton coeur, jaillir la vie : sers-la ! » (Le sang versé) ; « Puissions- nous à jamais / garder telle une source / le don de cette paix / irisée sur le ciel / et restaurant en nous / l’accueil et le respect / pour tout être vivant » (Noé). Le bonheur d’un jardin, un peu à la manière d’un Grosjean ou d’un Jaccottet, invite à célébrer la beauté du monde offert : « Me voici cherchant à transcrire à traits d’encre / quelque écho du bonheur que met en nous la vie, / sans omettre d’entendre, heurts et malheurs, / [...] À l’orient de la terre, / il n’y a plus de paradis / remis qu’il est / entre nos mains. » À la fin de l’ouvrage, un index permet au lecteur qui voudrait relire lui-même les textes bibliques, de s’y référer aisément.
Natalie Héron