Christus : Nous avons pensé qu’un dialogue serait bienvenu pour nous aider à comprendre à quels types de réalités sont confrontés les scientifiques. Pourriez-vous d’abord vous présenter ?
Claire Collignon : Je suis ingénieur depuis dix ans, et travaille actuellement sur le traitement des combustibles nucléaires.
Christus : Comment en êtes-vous venue à cette formation d’ingénieur ?
C. C. De manière un peu classique. Quand on réussit à peu près et qu’on n’a pas d’idée préconçue sur ce qu’on veut faire, on se retrouve en classe préparatoire. Je me suis alors posé la question d’aller soit dans une école d’ingénieur, soit de retourner à l’université pour devenir enseignante : n’ayant pas d’ingénieur dans ma famille, je ne savais pas du tout à quoi correspondait ce type de métier. Puis j’ai fait des stages, et je me suis rendu compte que j’aimais bien le monde de l’entreprise et la recherche appliquée.
Jacques Arènes : Quant à moi, j’ai fait des études de mathéma­tiques pendant un certain temps, des mathématiques pures et ap­pliquées, notamment statistiques. J’ai travaillé à EDF, quand j’étais en DESS, sur des données relatives aux centrales nucléaires : on auscultait les vibrations dans les turbines, à l’aide des premiers ordi­nateurs qui existaient à l’époque, dans les années 80. Ce monde-là, je l’ai abandonné progressivement, même si j’ai travaillé en épidé­miologie psychiatrique, où les statistiques avaient leur importance, où donc l’esprit scientifique restait présent.
Christus : Même question : comment en êtes-vous venu à choisir cette voie plutôt qu’une autre ?
J. A. J’étais bon en mathématiques, et j’étais aussi littéraire. J’ai donc longtemps hésité, mais autour de moi, dans ma famille, on m’a dit : « Fais des maths, c’est quand même plus sûr... » J’ai donc suivi une classe préparatoire scientifique. Dès le début, je ne me sentais pas complètement à l’aise, mais