Christianisme et nature, Vie Chrétienne, 2004, 76 p., 14 €.
Je m'explique, Ed. J.-P. Demoulin. Seuil, 2005, 312 p., 23 €.


Scientifique, théologien, enseignant François Euvé, jésuite, est bien placé pour dresser un tableau du rapport de la nature à la tradition chrétienne.
L'auteur montre combien est fausse l'accusation portée contre le christianisme par l'écologie radicale qui fait de la nature la valeur suprême. Il ne défend cependant pas une conception instrumentale de la création, comme si les créatures n'étaient que des outils Pour ce faire, l'auteur relit les textes bibliques, et présente plusieurs figures exemplaires : de Maxime le Confesseur jusqu'à Olivier Clément, en passant par Hildegarde de Bingen, François d'Assise, Ignace de Loyola et Teilhard de Chardin.
La présentation de Teilhard est exemplaire . si un Dieu personnel se trouve en toute chose, la chose ne peut pas être cet être limité qu'imagine le matérialisme vulgaire ; elle ne peut eue que le vecteur d'une relation humanisante où chacun cherche et trouve Dieu au moment même où l'esprit affirme en nous l'unité portée par l'évolution. Le lecteur pourra se faire une idée de la pertinence de cette lecture distanciée en consultant les textes mêmes de Teilhard, rassemblés par Jean-Pierre Demoulin dix ans après la mort du célèbre jésuite, et réédités tout récemment avec quelques ajouts.
Dans ces textes teilhardiens, les problèmes théologiques s'appuient sur la conviction, audacieuse avant-guerre, selon laquelle l'évolution conforte la théologie paulinienne. Vient alors à l'esprit (dans les deux sens de l'expression) une création qui joue en tâtonnant sur la loi des grands nombres et qui accepte quelques « ratés » (le mot est de Teilhard de Chardin) « par nécessité statistique » (sic).
Cette idée teilhardienne de création en forme de jeu et concevant le mal comme un « sous-produit inévitable » est le fond de tableau dont la théologie de François Euvé a su se dégager en travaillant à frais nouveaux la spiritualité ignatienne.