Le 7 janvier dernier, les représentants de l’Église catholique et ceux de l’État décidaient, lors de leur rencontre annuelle, de créer un groupe de travail sur « le statut des laïcs engagés dans des activités pastorales » 1. Et sans attendre, la ministre de l’Intérieur et des Cultes, Michèle Alliot-Marie, suggérait la création d’un « contrat de volontaire religieux », calqué sur celui existant pour le monde associatif.
En plein regain du débat sur la laïcité, une telle « négociation » entre l’Église et l’État aurait pu faire réagir. Il n’en a rien été. Le sujet est-il trop technique, ou ne concerne-t-il que trop peu de personnes ? Pourtant, il serait intéressant de se demander pourquoi l’Église sollicite un statut dérogatoire du droit commun pour celles et ceux qu’elle emploie dans ses diocèses et ses paroisses. Au regard du droit du travail, les laïcs qui exercent de façon permanente des fonctions ecclésiales (aumôneries, catéchèse…) concluent un contrat à durée indéterminée ; en revanche, vis-à-vis de l’Église, ils agissent dans le cadre d’une « lettre de mission » dont le retrait entraîne résiliation du contrat. D’où d’inévitables frictions, que les conseils de prud’hommes ont parfois eu à connaître ces dernières années…

La « doctrine du mandat »


Ce n’est pas ici le lieu de trancher les éventuelles contradictions entre le Code de droit canonique et le Code du travail. Ni de décider si une activité religieuse fondée sur un engagement spirituel peut être considérée comme un contrat de travail. Non, cet exemple n’est cité que pour souligner combien il semble difficile pour l’institution ecclésiale, aux yeux de l’historien ou du simple observateur, de trouver la bonne façon d’associer les laïcs à sa mission ; et en particulier de définir le type d’autorité qui est la leur – mais aussi celle à laquelle ils ont à répondre – en cette situation. Et cela au moins depuis que Pie XI a fait de l’Action catholique, dans les années 30, le bras séculier d’une présence chrétienne dans toutes les composantes de la société. La règle était alors la « doctrine du mandat », selon laquelle « les mouvements d’Action catholique sont chargés par l’épiscopat d’une mission qui les autorise à s’exprimer et à agir au nom de l’Église, mais sous réserve de ne pas sortir du cadre strictement apostolique qui leur est fixé et dont leurs aumôniers doivent être les garants » 2. L’autonomie des laïcs vis-à-vis de l’institution s’en est trouvée singulièrement limitée, et d’abord sur le plan de l’engagement politique.
À moins d’une soumission muette, les conflits étaient inévitables ! Les premiers sont survenus dans les années 50, au moment d’une certaine reprise en main romaine vis-à-vis d’initiatives jugées dangereuses pour toutes sortes de raisons : théologiques (condamnation de la « Nouvelle théologie ») ; sociales (arrêt de l’expérience des prêtres ou...

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