Notre relation aux images est aussi complexe qu'incontournable. Tant dans la vie courante que dans la vie intérieure, elles prennent une place immense, pour le meilleur et pour le pire. Ce nouveau dossier de Christus vise à nous aider à faire la part des choses, à nous interroger sur l'usage que nous faisons des images, plus encore à repérer les effets qu'elles ont sur notre imagination, notre vie intérieure et nos relations.
Nous parlons volontiers aujourd'hui d'un envahissement visuel qui conduit à une fatigue, alors même qu'il nous reste toujours une liberté suffisante pour nous en distancier. L'enjeu est ici peut-être de nous laisser davantage habiter par les images qui portent à la paix ou au courage.
En christianisme, nous observons l'ambivalence de notre rapport aux images. D'un côté, l'Église, à un moment de son histoire, a interdit toute représentation divine, y compris celle du Christ. De l'autre, les images sont objet de dévotion jusqu'à être vénérées et même embrassées. Pour les orthodoxes, par exemple, renier les icônes signifie renier l'Incarnation. Elles sont alors approchées pour plus qu'elles-mêmes, en ce qu'elles renvoient au très vaste récit de la Révélation, comme signe vers un au-delà. En ce sens, elles ne contredisent nullement l'invisibilité divine.
Dans la vie spirituelle, nous retrouvons cette même ambivalence. L'image de piété est considérée comme soutien de la prière et capacité à relier à la communauté. Ignace de Loyola, pour sa part, invite le retraitant à user de son imagination dans l'oraison. Les Exercices spirituels conduisent en même temps à ne s'attacher à aucune image du Christ de manière définitive, car Dieu est toujours plus grand que toute représentation que nous pouvons nous en faire. Jean de la Croix, de son côté, convoque à l'abandon de toute image… tout en concédant que cette attitude est la tâche d'une vie.
Puisque nous croyons que le Christ est Image du Dieu invisible et qu'il veut des disciples à son image, nous sommes convoqués à chercher un juste rapport à toute image au regard de cette image fondamentale et fondatrice.