Nous ne nous en étonnons pas assez ! Nulle part dans le Nouveau Testament, un repas du Seigneur célébré par des chrétiens n'est décrit de façon précise. L'ordre de Jésus « Faites ceci en mémoire de moi » n'est rappelé que par Paul (1 Co 11, 25) et Luc (Lc 22, 19). Les premiers écrits chrétiens sont les lettres de Paul (de 49 à 58), et jamais Paul n'invite lui-même les nouveaux croyants à partager le repas « dominical ». Pourtant, tout se passe comme si c'était un donné, une évidence constitutive de la vie d'une communauté chrétienne. Tout concourt à montrer que d'emblée les chrétiens se sont rassemblés : ils formaient une ekklèsia, un mot qui désigne la convocation et l'assemblée des hommes libres dans la cité grecque, et leur réunion consistait en prières, récits et repas, parole et nourriture (Ac 2, 42). Le Nouveau Testament est étonnamment discret sur la question. Au-delà des échos du dernier repas de Jésus dans les trois évangiles synoptiques, nous avons la catéchèse eucharistique d'Emmaüs (Lc 24, 13-35) et l'expression « rompre le pain » qui apparaît alors revient quatre fois dans les Actes des Apôtres (Ac 2, 42 ; 2, 46 ; 20, 11 ; 27, 35). Les deux derniers récits ont cette caractéristique forte d'être liés à des événements de mort et de résurrection : dans le premier cas, Paul vient de relever le jeune Tychique qui, assoupi par son interminable discours, était tombé par la fenêtre du troisième étage ; dans le second cas, Paul, au plus fort de la tempête, invite les marins à manger et à ne