S'il est un thème dans lequel les moines aiment à se retrouver, c'est bien celui de la veille. Il leur est même arrivé d'employer ce terme pour se caractériser. En effet, en grec, la veille, la vigilance, se dit nepsis et certains se sont appelés justement des « neptiques ». Les moines du mont Athos se réclament encore de ce courant. En fait, ce thème est lié au double commandement de l'amour, dont Jésus dit qu'il résume la Loi et les Prophètes. La vigilance est nécessaire pour que les obstacles à la mise en œuvre de ce commandement soient réduits à rien. Ceux-là sont regroupés sous le nom de « démons » qui traversent notre condition psychique. Une telle veille est nécessaire durant toute la vie et jusqu'à l'avènement en gloire du Fils de l'homme en lequel nous serons unis à la Fin des temps, comme un seul homme nouveau participant de la nature divine.

Durant toute ma vie monastique, un verset biblique n'a cessé de m'habiter. Il est tiré du livre d'Isaïe : « Veilleur où en est la nuit ? Le veilleur répond : “Le matin vient, et puis encore la nuit… Si vous voulez des nouvelles, interrogez, revenez.” » (Is 21,11-12). D'une certaine manière, c'est pour cette veille-là que j'ai voulu être moine. Une telle disposition assume le fait d'être dans l'incertitude et en même temps dans la foi. Ce clair-obscur n'est-il pas le fin mot de la vie humaine ? Bien que les moines soient particulièrement sensibles à cette dimension, ils n'en sont pas les seuls dépositaires, en effet. Celle-ci concerne tout un chacun. L'enseignement biblique comme la tradition chrétienne et monastique en donnent des caractéristiques sur lesquelles il