Début juillet 2013. Parmi les courriels du matin, je trouve celui-ci : « Nous ne sommes ce soir qu’un dernier carré. Tiendrons-nous tout l’été ? » L’étudiant qui communique ainsi son anxiété fut de toutes les manifestions hostiles au « mariage pour tous », sans ostentation ni tapage, et il fait partie de ces « veilleurs » qui, bon an mal an, opposent leur silence tenace et leurs citations littéraires aux cordons de policiers. Après les cours, il quitte le plateau de Saclay et rejoint les Invalides, une fois par semaine, avec un peu de lecture sous le bras.

Aumônier d’étudiants, je m’interroge : quel service rendre maintenant à ces jeunes ? En mai dernier, la loi fut promulguée : le mariage est désormais ouvert aux « couples de personnes de même sexe ». Pour autant, l’affaire n’est pas classée, les arguments ne sont pas désamorcés. Un clivage profond s’est creusé entre des idéologies contrastées, et toute l’énergie qui s’est déployée n’a pas vocation à retomber : quelque chose devra se poursuivre (un document de la Conférence des évêques de France invite à « poursuivre le dialogue ») ; quelque chose peut-être doit commencer, s’envisager autrement. L’été est propice à réfléchir pour tirer des leçons, en vue du bien des personnes et dans la visée du bien commun.

Voici donc un petit essai, conçu d’abord pour s’appliquer à des jeunes, aux quelques-uns bien spécifiques que je connais. Ma réflexion se veut « pastorale », celle d’un aumônier soucieux d’éducation humaine et spirituelle. Elle se fera en trois temps :
1. Un coup d’œil sur « l’état des troupes » ;
2. La proposition d’une attitude de fond, qui doit être « spirituelle » ;
3. Quelques leçons rapportées à la vie sociale et politique.

Enthousiasme et confusion

Écoutons d’abord les jeunes eux-mêmes, ceux qui se sont « mobilisés ». Relativement à la population d’un campus, ils constituent évidemment une petite minorité. Pour la plupart des étudiants, le « débat » n’en était pas un, il n’avait pas lieu d’être, ou laissait indifférent. Quant aux membres actifs des aumôneries, la plupart d’entre eux ont rejoint une fois la « Manif pour tous », mais en sont souvent restés là. J’estime à un tiers ceux qui se sont engagés à fond, sur la durée, mobilisant leurs réseaux pour assurer la sécurité. Enfin, je garde soigneusement en tête, pour ne pas les négliger, ceux qui furent mal à l’aise avec ce débat et avec